KIGALI, Rwanda – Le gouvernement rwandais a suspendu vendredi toutes les émissions de la BBC britannique dans la langue la plus parlée du pays, le kinyarwanda, pour dénoncer la diffusion récente d’un documentaire sur le génocide au Rwanda.
Le gouvernement du président Paul Kagame, des parlementaires et des survivants du génocide ont exprimé leur colère à la BBC, après que le documentaire ait suggéré que le président Kagame avait possiblement été impliqué dans la destruction de l’avion de son prédécesseur, un accident qui a provoqué le massacre.
Le documentaire d’une heure — «Rwanda, The Untold Story» — cite aussi des chercheurs américains selon qui les 800 000 Rwandais tués pendant le génocide étaient en bonne partie des Hutus et non principalement des Tutsis comme l’affirment les dirigeants rwandais.
La ministre rwandaise des Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo, qualifie le documentaire «d’attaque contre le Rwanda et son peuple», et affirme que son gouvernement pourrait sévir contre la BBC.
Les autorités rwandaises ont annoncé tard vendredi la suspension de la programmation de la BBC en langue régionale. Une agence gouvernementale a dit être intervenue après avoir reçu des plaintes du public. Elle affirme que d’autres sanctions sont possibles.
La BBC a répliqué par voie de communiqué que le documentaire soulève des questions pénibles, mais qu’il est de son devoir de se pencher sur des événements difficiles. La BBC dit croire que le documentaire a apporté une contribution utile à la compréhension d’un événement historique tragique.
La BBC nie que le documentaire constitue une négation du génocide contre les Tutsis et rappelle qu’il contient de nombreuses références aux Tutsis massacrés par des Hutus.
Le documentaire laisse entendre que le président Paul Kagame a ordonné l’attaque contre l’avion de l’ancien président Juvenal Habyarimana, ce qui aurait déclenché le génocide.
Plus tôt cette semaine, le Parlement rwandais a adopté une résolution pour interdire la programmation de la BBC et déposer des accusations contre les journalistes responsables du documentaire.
Les parlementaires réclament des excuses de la BBC. Des étudiants universitaires ont protesté contre le documentaire. M. Kagame a accusé la BBC d’avoir réuni des révisionnistes pour déformer les faits.
Le documentaire cite d’anciens alliés du président Kagame, dont son ancien chef d’état-major, le lieutenant-général Kayumba Nyamwasa.
Un représentant de l’organisation new-yorkaise de défense des droits de la personne Human Rights Watch, David Mepham, a rappelé que le régime Kagame n’a aucune tolérance envers la dissidence ou l’opposition politique.
Par Edmund Kagire
Metro The Associated Press.